Ce texte a d'abord été publié dans le Journal de Montréal le 25 mars 2021.
Après nous avoir vendu un « Amazon Québec » sous forme de Panier Bleu, le ministre de l’économie Pierre Fitzgibbon semble vouloir revitaliser le centre-ville en créant un « WeWork Montréal, » à nos frais.
Il s’agit de l’un des éléments du plan de relance de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain que le gouvernement provincial a financé avec 8,5 millions de dollars de l’argent des contribuables.
Il semblerait que Fitzgibbon aime bien les projets de copie locale d’entreprises à succès internationales.
En termes de développement économique, il ne s’agit pas là d’une stratégie gagnante. Ce qui a fait le succès des géants de la technologie n’est pas de copier le plan d’affaires d’autrui, mais bien leur capacité à innover.
Prenez le moteur de recherche Bing par exemple. Microsoft a englouti des milliards de dollars afin de lancer ce moteur de recherche et compétitionner Google. Malgré les sommes investies, Bing n’a réussi qu’à s’accaparer 2,7 pour cent des parts de marché.
Le problème n’était pas le manque d’argent investi, mais bien le manque de démarcation par rapport à son compétiteur. Les utilisateurs de moteurs de recherche n’ont pas vu de bonne raison de passer à Bing, et sont restés loyaux à Google.
Sur le plan local, ce n’est pas non plus en copiant le plan d’affaires d’autrui et en y collant une belle fleur de lys que nos entrepreneurs ont su développer le Québec moderne. C’est en trouvant des solutions innovantes à des problèmes de société.
C’est en réponse à l’isolement des régions en hiver que Joseph-Armand Bombardier a inventé l’autoneige. C’est grâce à l’identification du réservoir d’épargne des agriculteurs canadiens-français qu’Alphonse Desjardins met sur pied le réseau des Caisses populaires pour faciliter leur accès au crédit.
Aujourd’hui, ces deux entreprises sont des leaders dans leur domaine. Bombardier produits récréatifs (BRP) est le plus grand manufacturier de motoneiges, tandis que Desjardins est la cinquième plus grande coopérative dans le domaine des services financiers.
Ces succès ne sont pas venus en calquant le plan d’affaires d’un compétiteur existant, mais bien en trouvant une solution innovante à des problèmes locaux.
Au lieu de subventionner des copies bleues de succès étrangers, Fitzgibbon devrait œuvrer à mettre en place les conditions nécessaires pour que les prochains succès soient des succès québécois.
Cela signifie arrêter de mettre millions par-dessus millions dans des projets de copies locales telles que le Panier Bleu, et travailler sur une simplification de la réglementation et la mise en place d’un système fiscal compétitif pour tous.
Selon les données de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, les exigences réglementaires ont coût un peu plus de 8,2 milliards de dollars aux entrepreneurs québécois l’an dernier.
Ces coûts représentent à la fois les frais à débourser pour obtenir certains permis, que les heures passées à remplir une myriade de formulaires gouvernementaux.
Ces exigences sont tellement coûteuses en fait, que leur coût dépassera la facture d’impôt provinciale de nos entreprises cette année, qui s’établit à 7,7 milliards de dollars.
Ces coûts réglementaires, tout comme ces coûts fiscaux, représentent d’importants freins à l’investissement pour nos entrepreneurs.
Dans un coup de sonde lancé par la FCEI auprès des entrepreneurs québécois, 55 pour cent d’entre eux ont dit qu’ils réaffecteraient ces coûts vers de l’investissement en équipements ou des projets d’expansion s’ils le pouvaient.
Cela représente un potentiel de croissance énorme, qui contrairement aux projets subventionnés de Fitzgibbon, n’auraient aucun coût pour les contribuables québécois.
Et ça aurait un impact beaucoup plus grand que de subventionner des copies de succès étrangers.